En matière d’urbanisme, les ordonnances se succèdent pour tenter de parvenir à un dispositif adapté tant aux enjeux sanitaires qu’économiques. La dernière en date a été publiée au Journal officiel du 8 mai 2020. Il s’agit de l’ordonnance n° 2020-539 du 7 mai 2020 fixant des délais particuliers applicables en matière d’urbanisme, d’aménagement et de construction pendant la période d’urgence sanitaire.

Rappelons en quelques mots que :

– la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 a déclaré l’état d’urgence sanitaire du 24 mars au 24 mai 2020,

– l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 a instauré un dispositif général de prorogation des différents délais, tant en matière administrative que contentieuse, applicable notamment aux actes d’urbanisme (ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période),

– le dispositif créé par l’ordonnance n° 2020-306 a été modifié à deux reprises par une ordonnance du 15 avril 2020 et par une ordonnance du 22 avril 2020 afin de créer un régime particulier aux autorisations d’urbanisme (ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de covid-19 et ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l’épidémie de covid-19),

– l’état d’urgence sanitaire a été prolongé jusqu’au 10 juillet inclus par la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

L’ordonnance n° 2020-539 du 7 mai 2020 a essentiellement pour objet de dissocier la durée de l’état d’urgence sanitaire et la durée de certaines mesures d’urgence en matière d’urbanisme.

Le 24 mai 2020 pérennisé pour les délais d’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme/certificat d’urbanisme et pour les délais de préemption

Ainsi, désormais, en ce qui concerne l’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme et de certificat d’urbanisme (article 12 ter de l’ordonnance 2020-306), les mesures de suspension et de report de délai sont organisées en tenant compte de la date du 24 mai 2020 et non plus de la date fluctuante de la cessation de l’état d’urgence sanitaire. En l’état actuel des textes :

> pour les demandes déposées avant le 12 mars 2020 dont le délai d’instruction n’est pas expiré avant le 12 mars 2020 : le délai d’instruction est suspendu depuis le 12 mars 2020 et reprendra son cours à compter du 24 mai 2020, peu importe la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire ;

> pour les demandes déposées à compter du 12 mars 2020 jusqu’au 23 mai inclus : le point de départ du délai d’instruction est reporté au 24 mai 2020, peu importe la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

Des dispositions comparables sont prises en ce qui concerne les délais relatifs aux procédures de préemption (article 12 quater de l’ordonnance 2020-306).

La rédaction de l’article 12 ter est par ailleurs clarifiée pour préciser qu’il trouve également à s’appliquer aux délais impartis à l’administration pour vérifier le caractère complet d’un dossier ou pour solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction.

Le 24 mai 2020 pérennisé pour les délais de recours contre les autorisations d’urbanisme

La même évolution est également décidée en ce qui concerne les délais de recours et les déférés préfectoraux à l’encontre d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir. La date du 24 mai est pérennisée indépendamment de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

L’article 12 bis de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, qui impose de distinguer la suspension des délais en cours et le report de délais n’ayant pas commencé à courir au 12 mars, fait désormais expressément référence à la date du 24 mai :

> pour les délais de recours des tiers déjà ouverts à la date du 12 mars 2020 : le délai de recours (de 2 mois) est suspendu depuis le 12 mars 2020 et reprendra son cours à compter du 24 mai 2020, sans que cette durée puisse être inférieure à 7 jours, peu importe la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire ;

> pour les délais de recours des tiers ouverts à compter seulement du 12 mars 2020 : le point de départ du délai de recours (de 2 mois) est reporté au 24 mai 2020, peu importe la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

L’ordonnance fait application de ces dispositions à des actes liés à la demande d’autorisation d’urbanisme s’agissant de la construction de locaux commerciaux, mais susceptibles de faire l’objet de recours distincts des autorisations d’urbanisme : les recours à l’encontre des agréments prévus à l’article L. 510-1 du code de l’urbanisme ainsi que les recours administratifs préalables obligatoires dirigés contre les avis rendus par les commissions départementales d’aménagement commercial dans les conditions prévues au I de l’article L. 752-17 du code de commerce.

Le 24 mai 2020, date de référence pour l’adaptation du délai de retrait des autorisations d’urbanisme

Enfin, l’ordonnance du 7 mai procède à un alignement du régime du retrait d’une autorisation d’urbanisme sur celui de l’instruction desdites autorisations, en le faisant relever de l’article 12 ter et non plus de l’article 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020.

Ainsi, désormais :

> pour les délais de retrait déjà ouverts à la date du 12 mars 2020 : le délai de retrait (de 3 mois à compter de l’édiction de l’acte) est suspendu depuis le 12 mars 2020 et reprendra son cours à compter du 24 mai 2020, peu importe la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire ;

> pour les délais de retrait ouverts à compter seulement du 12 mars 2020 : le point de départ du délai de retrait (de 3 mois à compter de l’édiction de l’acte) est reporté au 24 mai 2020, peu importe la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

Cet aménagement du délai de retrait des autorisations ne s’applique toutefois pas au retrait des certificats d’urbanisme, qui continue de relever de l’article 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020.